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Proche aidance d’aînés
Mettre en lumière la proche aidance d’aînés, ce n’est pas nier l’existence et les difficultés associées aux autres types de proche aidance, que ce soit celle d’un enfant lourdement handicapé, d’un conjoint/partenaire ou d’un ami.
Dans une société vieillissante, de surcroît lorsque les proches aidants ont besoin de s’autoreconnaître et d’être reconnus et soutenus, focaliser sur la proche aidance d’aînés c’est s’intéresser à la réalité que vivent actuellement le plus de personnes proches aidantes. Un phénomène qui, avec le vieillissement accéléré de la population et la prévalence des troubles neurocognitifs majeurs qui en découlent, touchera davantage de personnes et dont la lourdeur s’amplifiera au cours des prochaines années.
Être proche aidant entraîne des conséquences négatives pour les personnes qui accompagnent un proche au quotidien. Pensons entre autres à l’épuisement, l’angoisse et le stress, l’isolement social, la précarité financière et les problèmes de santé (physique et mentale) et les conflits travail (ou études)-vie personnelle qui en résultent. Des conséquences qui sont plus importantes lorsque la personne aînée est atteinte de troubles neurocognitifs majeurs, puisque cette proche aidance est considérée comme étant la plus difficile proche aidance d’aînés.
Littératie juridique en santé
L’inclusion du droit dans la littératie en santé
Les besoins d’informations des proches aidants et l’importance de développer leurs connaissances et compétences en santé (i.e. leur littératie en santé) sont généralement reconnus par les proches aidants, les intervenants qui les accompagnent - qu’ils proviennent des organismes communautaires ou du réseau de la santé et des services sociaux - ainsi que les chercheurs. Y compris dans les politiques publiques. L’Axe 2 de la récente Politique nationale pour les personnes proches aidantes (MSSS, 2021) et le Plan d’action gouvernemental 2021-2026 (MSSS, 2021) aborde d’ailleurs spécifiquement ces besoins. Or, les besoins d’informations des proches aidants vont bien au-delà d’en apprendre davantage sur la proche aidance et sur la maladie de la personne aidée ainsi que sur les soins, services et ressources disponibles.
Les proches aidants ont aussi besoin de connaissances et de compétences juridiques spécifiques au contexte de proche aidance dans lequel ils évoluent (i.e. une littératie juridique en santé). Tout particulièrement, lorsqu’ils accompagnent une personne aînée atteinte de troubles neurocognitifs majeurs. Pensons à toutes ces situations (i.e. conduite automobile, déni de la maladie, refus d’évaluation et de soutien à domicile, médication, hébergement, …) qui, tout au long de l’évolution de la maladie, et souvent bien avant que la personne aînée ne soit déclarée légalement inapte, suscitent chez les proches aidants des inquiétudes et des questionnements dont une partie des réponses se trouvent dans le droit et une meilleure connaissance de celui-ci. Des inquiétudes et des questionnements juridiques qui sont actuellement amplifiés depuis l’entrée en vigueur au Québec (le 1er novembre 2022) de la réforme de la protection des personnes en situation de vulnérabilité.
Proche aidance en emploi
La proche aidance revêt deux visages dans les opérations quotidiennes des organisations.
Employés proches aidants
Selon l’Institut de la statistique du Québec, au Québec près de :
60 % des proches aidants occupent un emploi;
30 % des proches aidants consacrent plus de 10 heures par semaine à fournir de l’aide ou des soins à un proche;
30 % des personnes entre 45 et 64 ans agissent comme proches aidantes. Les femmes étant plus susceptibles (36 %) que les hommes (26 %) d’être proches aidantes.
En fonction du rôle assumé, des heures consacrées, du soutien obtenu, de la charge émotionnelle vécue et, pour les employés de la « génération sandwich », des responsabilités parentales avec lesquelles ils doivent aussi composer, les responsabilités de proche aidance des employés peuvent occasionner des conflits avec leurs activités professionnelles, de l’épuisement et de la détresse psychologique, voire un retrait hâtif du marché du travail. Il est important pour les employeurs de s’intéresser à la proche aidance et de développer une culture du prendre soin (care) d’autant que certaines personnes :
ne se reconnaissent pas « proches aidantes » ou elles ne le font que (trop) tardivement;
n’osent pas parler de leur situation avec leur supérieur et leurs collègues et évitent même de recourir aux mesures de conciliation travail-famille disponibles, par peur de stigmatisation ou de conséquences négatives sur leur carrière.
La pandémie, au-delà de nous démontrer l’importance de mieux prendre soin de nos aînés en situation de vulnérabilité, a entre autres mis en lumière l’accroissement des inégalités économiques entre les hommes et les femmes, notamment à cause de la charge de travail non rémunéré plus importante de ces dernières (i.e. travaux domestiques, responsabilités parentales, responsabilités de proche aidance). Elle nous a cependant aussi donné de nombreux exemples d’employés, d’équipes, de gestionnaires et d’organisations ayant su faire preuve de flexibilité, d’agilité, d’innovation, de courage, de résilience, d’empathie et de compassion pour s’adapter rapidement aux changements en temps de crise. Souhaitons que ces valeurs demeurent bien présentes au sein des organisations et qu’elles permettront dorénavant d’offrir des milieux de travail et des mesures de conciliation travail-vie personnelle mieux adaptés à la dure réalité de la proche aidance… notamment d’aînés atteints de troubles neurocognitifs.
proches qui aident une clientèle aînée
Offrir des services à une clientèle aînée amène souvent à interagir avec les proches qui les aident. Pensons aux employés des services à la clientèle téléphoniques des banques ou des fournisseurs internet à qui une personne aînée demandera d’expliquer une situation problématique ou une procédure à un proche parce qu’elle est trop difficile à comprendre/suivre pour elle.
Avec l’entrée en vigueur le 1er novembre 2022 de la réforme de la protection des personnes, une nouvelle mesure d’assistance permettra à une personne vivant certaines difficultés de faire reconnaître officiellement deux de ses proches comme assistants, et ce en une seule démarche auprès du Curateur public. Pour être prêtes, les entreprises doivent donc dès maintenant se familiariser avec cette nouvelle mesure et apporter les changements nécessaires à leurs procédures ainsi qu’à leurs formations aux employés. Elles devraient aussi s’assurer d’en connaître davantage sur le vieillissement, la proche aidance et les conditions (dont les pertes cognitives) qui pourraient rendre la communication avec un assistant inappropriée.